Voici dans sa quasi-intégralité le test de Silent Hill 3 que j'avais réalisé avec un ami pour le site Jeux-Europe.com à la sortie du jeu en version européenne en mai 2003.
Je suis fan de cette série et j'espère que ce petit texte saura convaincre certains d'entre vous de vous y essayer. Il faut noter que depuis une adaptation ciné de Silent Hill est sortie ; Réalisé par Christophe Gans (Crying Freeman), elle s'avère être d'assez bonne facture.
Pour être tout à fait complet sachez que ce jeu est désormais disponible sur PC ainsi que sur PS2 dans la compilation "Silent Hill Collection" que je vous recommande chaudement. Elle contient également le deuxième épisode et le quatrième, que je trouve un peu moins réussi.
Test de Silent Hill 3 sur Playstation 2
Un an et demi après le sublime Silent Hill 2, la Silent Team (mais où sont-ils allés chercher ce nom ?) remet le couvert, et nous sert une fois de plus un monument du Survival / Horror. Oui, je sais, le suspense n'est pas mon fort.
Welcome Back !
Alors qu'avons-nous découvert après avoir inséré cette merveilleuse galette dans la PS2 ? Eh bien tout d'abord, une intro très réussie et assez longue, où l'on découvre Heather, la nouvelle héroïne, quelques autres personnages (chut !) et l'univers ocre de ce Silent Hill 3. La musique rock s’y trouve excellente, preuve qu Akira Yamaoka, qui s'est vu attribué une promotion étant passé producteur, n'a rien perdu de son immense talent de compositeur. On découvre aussi qu'à l'instar du premier volet, on ne cessera de passer du monde normal (enfin, à deux trois détails près ^ ^) à la dimension altérée, un véritable enfer. Cette intro est comme d habitude un mélange de différentes cut-scènes du jeu, mais cette fois-ci, on remarque qu'il n'y a plus aucune séquences en images de synthèse ! En effet, ces cinématiques ont toutes été réalisées avec le moteur graphique du jeu. Rassurez-vous, SH3 est magnifique, et donc les cinématiques sont toujours aussi belles qu'avant.
Heather vit avec son père dans la banlieue de Silent Hill. Cette jeune femme, qui a la langue bien pendue, et qui ne se laisse pas faire, semble bien plus vivante que James, le héros de SH2, pour preuve : elle est très bien animée, rien à voir avec les pantins que nous avons l'habitude de voir dans d'autres productions ; son visage est réaliste, la voix colle parfaitement au personnage. On remarque aussi que lors d'inspections d'objet ou autre, elle fait beaucoup plus de commentaires.
Tout donne l'impression que Heather est une vraie femme, avec ses états d'âme etc. Le joueur s'attache donc à elle au fil de l'aventure, et se met vraiment à sa place dans certains cas. C'est sans doute pour cela que certains passages du jeu sont si marquants.
On commence l'aventure dans un centre commercial à priori banal. Heather se réveille après un mauvais rêve alors qu'elle s'était assoupie à une table d'un snack. Là, un curieux detective privé l'interpelle. Heather ne veut rien avoir à faire avec lui et le fuit. Alors qu'elle cherche une sortie, elle se rend compte que le centre commercial n'est plus tout à fait le même et va basculer rapidement dans un monde d'horreur.
Je ne vous en dévoilerai pas plus, mais sachez juste que le scénario de ce SH3, toujours écrit par Hiroyuki Owaku, est excellent, et que les personnages sont tous très réussis, et tous un peu tarés sur les bords… A chaque cinématique, on jubile à l'idée d'en apprendre plus sur l'histoire. D'autant que ces cinématiques sont toutes exceptionnelles. La mise en scène y est percutante : Caméras toujours bien placées, plans assez originaux, ambiance mortelle.
Les personnages sont très réalistes, et les animations faciales sont tellement bien faites que l'ont ressent parfaitement les émotions que les développeurs ont voulu faire passer : peur, haine, tristesse… De plus, les doublages (en anglais, hein) sont parfaits, ce qui est plutôt rare dans un jeu. On sent que les doubleurs se sont investis à 100% dans leur rôle.
Les règles de l Enfer.
Passons maintenant au gameplay en lui-même. Ce Silent Hill 3 repose essentiellement sur les bases des précédents opus. Vous aurez toujours votre précieuse amie la carte qu Heather griffonnera suivant que les portes soient ouvertes, fermées ou bien condamnées, et indiquera les salles où il est susceptible de faire une action spécifique. Toujours aussi pratique et essentielle à votre progression car les lieux visités sont plutôt vastes. Parmi ceux-ci, on remarque la quasi-disparition des phases de jeux dans les rues de Silent Hill, on ne perd plus son temps à parcourir des distances pharamineuses à pied qui cassaient le rythme du jeu. Donc la plupart du jeu se déroule en intérieur à notre plus grande crainte. En effet, le système génial de la double dimension est plus que jamais présent dans ce Silent Hill 3. Pour ceux qui ne connaissent pas encore la série, vous devrez parcourir la plupart des bâtiments visités deux fois : une première fois dans une dimension dite normal et une seconde fois dans une dimension surnommée par certains joueurs de dimension X, altérée ou cauchemardesque ! Dans la dimension X vous pourrez constater des changements significatifs dans la déco ainsi qu'une plus grande abondance en monstres. Nous y reviendrons en détail plus tard.
En ce qui concerne la maniabilité, celle-ci reste proche des deux précédents opus. Elle
s'est de plus bien assouplie en rendant le personnage contrôlé plus réactif. On ne peut vraiment pas reprocher grand chose mais ni crier au génie. Vous aurez de nouveau le choix entre le maniement 3D, à la Resident Evil, ou bien le maniement 2D (le personnage se dirige vers la direction qu on lui impose au stick ou à la croix multidirectionnelle) que je trouve personnellement plus instinctif et plus pratique lors des affrontements. Petite nouveauté : vous aurez désormais la possibilité de vous protéger contre les attaques des monstres afin de réduire considérablement les dégâts reçus, plutôt sympathique. A noter aussi que désormais le fait de donner un coup de pied sur un ennemi à terre n'aura plus pour effet de l'achever comme c était le cas dans les deux premiers SH. Pour vous défaire de ces derniers, votre arsenal sera à la hauteur, il sera constitué de moult armes blanches très variées, assez jubilatoires dans leur utilisation, et d’autres armes à feu plus classiques. Votre inventaire est devenu un peu plus clair qu auparavant avec un classement de son contenu par catégories : objets, armes et provisions (qui renferme vie et munitions.).
Vous aurez encore à résoudre des énigmes à partir de textes, toujours aussi bien pensées. A noter que vous choisissez leur difficulté, les cerveaux astucieux et ambitieux pourront se laisser tenter par le mode hard qui l'est réellement. Rien que la première énigme dans ce mode de jeu vous demandera des connaissances assez importantes de l'oeuvre de W.Shakespeare !
De même, vous avez trois niveaux de difficulté pour l'action. SH3 confortera ainsi tout type de joueurs.
La durée de vie, quant à elle, s'avère à regret conforme au genre. Une première partie se boucle donc avec entre 5 et 10 heures au compteur selon votre niveau et votre façon de jouer. L'apparition de pièges mortels l'augmente quelques peu, car accroissant le nombre de game over, mais pas de quoi sauter au plafond non plus. La présence des fins multiples et de quelques bonus sont tout de même présent pour motiver à prolonger le cauchemar.
L'atmosphère "SilentHillienne"
Les codeurs de la Silent Team se sont donnés à fond pour nous donner une ambiance encore plus terrifiante, chose qui n’était pas vraiment aisée. Première bonne nouvelle, on a la possibilité de mettre le jeu en 60Hz. Les graphismes atteignent un niveau de détail assez remarquable avec des décors très riches ainsi que des textures des plus fines et des plus variées. Le monolithe noir de Sony a été extrêmement bien exploité. On ne pourra aussi que s'extasier devant les animations faciales qui sont parmi les plus impressionnantes et les plus réalistes qu'il m'ait été donné de voir dans un jeu vidéo. Le filtre graphique de SH2 est toujours présent, mais plus discret. La gestion des ombres, quant à elle, se trouve encore plus réussie. Les développeurs se permettent aussi d'innover en nous donnant des effets graphiques totalement nouveaux dans un jeu vidéo, que l'on retrouvera surtout dans la dimension X. Je ne vais pas vous les énoncer afin de vous laisser le plaisir de la découverte.
Ces graphismes sont donc au service d'une ambiance toujours plus malsaine et oppressante, et oppressé vous allez l'être en jouant à ce Silent Hill 3, croyez-moi. SH3 repousse les limites de la peur, vous n'aurez aucun instant de répit grâce à la cadence parfait de l'aventure, et lorsqu il s'agit de glacer le sang du joueur, les membres de la Silent Team redoublent de génie et surpassent largement l'imagination des êtres normaux que nous sommes. Le jeu est parsemé de petits détails totalement déjantés qui mettent le joueur constamment mal à l'aise et qui feront battre son cœur à des vitesses jamais atteintes. Et le tout empire de façon exponentielle lorsque l'on passe dans cette fameuse dimension X, cela en devient presque insoutenable. Et lorsqu'il ne se passe rien, la peur est toujours aussi présente du fait que l'on sait pertinemment que cela va repartir de plus bel mais on ne sait jamais quand. Et ce que l'on craint encore plus, c'est l'idée que la prochaine fois risque d'être encore pire. Mais la fascination du joueur, sa naturelle curiosité et son désir de progresser dans ce monde hostile sont plus forts et font que l'on adore ça et que l'on continue. Telle est l'ambiguïté du joueur de Silent Hill. Vous l'aurez donc compris, la peur de ce Silent Hill peut être qualifiée de peur violente, vous l'apprécierez dès le début du jeu, jamais l’amorce d’un jeu n'aura été si virulente ! Elle repose aussi sur notre peur naturelle de l'inconnu qui est matérialisé par le fait que l on évolue toujours avec un champ de vision réduit, soit dans l obscurité simplement éclairée de votre petite lampe torche, soit dans le brouillard épais de la ville.
Evidemment, un Survival ne serait pas un Survival sans son lot d épouvantables créatures sanguinolentes, visqueuses et menaçantes : vous aurez à affronter des bons vieux cerbères des familles, des aides soignantes, qui vous feront complètement oublier la douleur (elles prennent leur travail à cœur), et d'autres créatures bien plus étranges encore, nées tout droit de l esprit de Masahiro Ito. Le bestiaire apparaît comme totalement original. On ressent toujours cette petite dose d'humanité dans chacun des monstres rencontrés, comme s'ils étaient le reflet d'une âme perdue et jonchée par la haine… terrifiant.
Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que Ito-san a été chercher son inspiration chez les peintres religieux spécialistes dans les représentations de l'enfer avec notamment Jérôme Bosch.
Nous sommes à des années lumières des zombis classiques de Resident Evil. Ces créatures variées et désormais en plus grand nombre ne manqueront pas de vous mettre sur les épaules une pression énorme, mais votre radio sera toujours là, vous indiquant la présence ou non de celles-ci. Là question que vous vous poserez alors sera : où sont-elles ? Eh oui, dans l'obscurité il est difficile de les repérer…
Maintenant, on peut donc se demander où ces artisans de l'émotion trouvent leur inspiration. Celles-ci sont en réalité très diverses. Pour ce qui est des décors de la dimension normale, on sait qu'ils vont faire énormément de repérages dans certains quartiers de villes délabrées. Ils s'inspirent aussi d’artistes peintres très divers ; Jérôme Bosch donc, mais aussi des artistes contemporains comme le peintre anglais Francis Bacon. Ils s'inspirent également de contes traditionnels japonais dont notamment un qui parle d'enfants disparaissants dans les trous de toilettes turques (si si, je vous assure !), ce qui explique la présence remarquée des toilettes dans chaque épisode.
Pour finir, la dernière composante essentielle de l'ambiance déjantée de SH, c'est bien évidemment la bande son. Akira Yamaoka est donc toujours aux commandes, et comme à son habitude, il s est montré plus qu'à la hauteur. D'ailleurs, vous vous en êtes rendus compte, puisque vous êtes du genre à aller voir les notes avant de lire le test. Nous n'avons pas hésité une seconde avant de mettre 10/10 dans la partie sons & bruitages.
Pour les musiques des phases de jeu, A.Y. confirme le génie de son style, en employant des musiques encore plus violentes, à l'image de la peur que l'on veut nous infliger. Celles-ci varient bien évidemment selon la situation, et suivant un dosage idéal. Les silences deviennent les plus pesants jamais subis.
Ensuite, les musiques durant les scènes cinématiques sont exceptionnelles, avec des mélodies discrètes et pertinentes, qui arrivent toujours au bon moment, et qui retranscrivent à merveille le malaise de chaque situation. On assiste pour la première fois dans la série à l'apparition de voix, dans des styles divers et variés. Certains passages vocaux font office de bruitages pour la transition entre les deux dimensions.
Les bruitages du jeu eux, sont encore plus déjantés et dérangeants que ceux des deux autres volets ; en effet, Akira a trouvé de nouveaux samples assez originaux, comme par exemple une modification numérique d'un hurlement de rhinocéros ou d'autres sons tout aussi inattendus encore ! Il y a comme d'habitude dans ce genre de productions des pleurs d'enfants, des hurlements de gens en train de se faire égorger etc. (bon, d accord, c'est pas habituel), et évidemment, l'indispensable son flippant de la radio..
En bref : Silent Hill 3 s'impose donc haut la main comme le meilleur jeu du genre, tout support confondus. Il décroche la palme du jeu le plus terrifiant jamais créé. Un must, bourré en sensations et en émotions. C'est avec ce genre de jeu que l expression art vidéo-ludique prend tout son sens. La Silent Team nous offre encore une expérience unique en innovant avant tout sur le plan artistique.
Pour apprécier au mieux le jeu, ainsi que tous les autres survival / horror d'une manière générale, nous vous conseillons vivement d'y jouer seul, la nuit, dans le noir complet. Utilisez un casque pour le son. Frissons garantis !